Avant de vous diriger dans le labyrinthe impénétrable de la digitalisation, il est important de s’intéresser aux piliers qui soutiendront la transformation digitale d’une ETI ou une PME. Les 6 clés de réussite présentées ici, la quasi-totalité des entreprises peut s’en doter sans complication pour tirer instantanément profit de la digitalisation. En tout état de cause, investir dans ces six clés en vaut la peine.
Synchronisez les horloges de vos cycles de vie
Les technologies digitales progressent vite et les marchés suivent. Dans ce contexte terriblement concurrentiel, une excellente démarche de gestion du cycle de vie de produit, ou PLM (pour Product Lifecycle Management) est indispensable. Unifier votre manière de gérer les cycles de vie du matériel et des applications informatiques est une des clés de réussite les plus importantes, parmi celles qui figurent dans cet article.
Lorsque vous vous aventurez dans la digitalisation, vos équipements, produits, machines et autres actifs de production vieilliront plus lentement que les logiciels qui les pilotent. Pour résoudre ce dilemme, une meilleure intégration et synchronisation des cycles de développement des matériels et logiciels est, dès le départ, nécessaire. Dans nombre d’entreprises qui fabriquent des produits non connectés d’ancienne génération, ce n’est pas le cas. C’est pourtant le seul moyen d’éviter de mauvaises surprises, liées à des défauts de coordination entre les fonctionnalités physiques et informatiques à un stade ultérieur de votre développement.
La croissance de la demande d’automobiles connectées, par exemple, offre de nouveaux horizons aux industriels, mais elle accroît aussi grandement la complexité. Gardez à l’esprit que dans les automobiles actuelles les composants structurants sont repensés tous les sept à dix ans, alors que les pièces d’habillage sont revues tous les trois à cinq ans au maximum. Cette durée tombe à deux ans environ pour l’informatique embarquée, avec des mises à jour tous les six mois. Pour coordonner ces différents rythmes de vieillissement, le mieux est d’adopter un PLM totalement intégré – un PLM digital, sur lequel s’articulera le développement de produit. Il permet aux constructeurs d’automobiles de diffuser des données variées à travers toutes les fonctions critiques (ingénierie, développement de produit, gestion de la supply chain, fabrication, services et marketing…) afin de faire fonctionner en cadence les différentes horloges.
Embarquez de l’intelligence logicielle et de la connectivité
Injectez du « smart » dans le produit, classiquement assimilable à un « stupide morceau de métal », afin qu’il puisse interagir avec son environnement humain ou matériel, y compris les autres produits connectés. Nous assistons déjà aux débuts de cette tendance. L’article physique nu, qu’il s’agisse d’un produit ou d’une machine industrielle, finira par ne plus être un créateur de valeur et deviendra une simple « boîte ». Son intelligence informatique déterminera sa qualité et également son niveau de prix et de marge sur le marché.
Quelques entreprises ont atteint ce stade. La fabrication d’appareils ménagers Bosch Siemens compte rendre tous ses produits intelligents et connectés d’ici quelques années. Avec la création de produits connectées et l’organisation des processus de production autour de machines connectées, l’intelligence informatique deviens un tissu musculaire qui donne vie à des ensembles matériels divers. Cette capacité peut être très profitable. Le géant allemand Siemens, par exemple, gère dans le sud de l’Allemagne une petite usine d’électronique qui est passée d’un niveau d’automatisation de 25 % en 1990 à plus de 75 % aujourd’hui. Le taux de défauts est ainsi tombé au-dessus de 11.5 par million et la production a été multipliée par 8.5, avec des effectifs presque constants.
Utilisez l’analyse de données pour obtenir une vision claire
Bénéficiez d’une aide à la décision à partir des données collectées par les produits connectés et par d’autres sources. Il s’agit, probablement, de la clé de réussite par excellence du 21ème siècle. La circulation sans entrave des données, leur collecte et leur analyse seront bientôt – ou sont déjà – le levier de rentabilité principal des entreprises hautement digitalisées. Imaginez des produits capables d’informer leur constructeur sur leur emplacement, leurs performances et leur état. L’information en temps réel peut couvrir un éventail étendu de données, depuis le comportement des clients, leurs discussions et leurs préférences jusqu’aux performances, au degré d’usure et de vieillissement des machines et produits, en passant par les causes de perturbation de fabrication.
La capacité à collecter ces données aura, pour les entreprises, une valeur énorme dans l’avenir. En raison de leurs investissements antérieurs dans des technologies opérationnelles et des systèmes d’information cloisonnés, les entreprises ne parviennent pas à exploiter ce potentiel. Cependant, dès lors que des produits ou actifs physiques connectés auront été développés et que, reliés aux réseaux, ils commenceront à transmettre des données, les nouvelles méthodes d’analyse de données aideront à redéfinir les business models ou à créer des activités entièrement nouvelles. Beaucoup d’entreprises possèdent des historiques de données volumineux qui pourraient alimenter des moteurs analytiques et délivrer ainsi des informations de grande qualité. L’industriel qui n’utilise pas l’analyse de données, même au niveau des projets, sera très fragilisé.
Rendez agiles vos sites de production
Utilisez l’automatisation industrielle chaque fois que possible pour accroître la rapidité et la souplesse de vos usines. L’automatisation transforme déjà les activités de production et la plupart des machines y sont aujourd’hui dotées de capteurs et de mécanismes de contrôle embarqués. En outre, ces appareils sont de plus en plus connectés aux systèmes de gestion, d’exécution, logistiques et d’ERP via le cloud industriel, de telle sorte qu’il est possible d’appliquer l’analyse de données. Les industriels disposent ainsi d’une vision et d’une supervision générales des processus de production, leur permettant d’agir sur la productivité. Ils peuvent, par exemple, détecter et prévoir des goulots d’étranglement, anticiper des pannes, améliorer la conformité, renforcer la disponibilité, réduire les déchets, accélérer les opérations de révision, piloter plus efficacement les nouveaux processus et gérer plus intelligemment une main-d’œuvre davantage connectée et collaborative. De plus, l’intégration en amont de la production dans le PLM/ALM accélère l’ensemble de la chaîne de conception, de développement et d’industrialisation, les retours d’information via l’analyse de données pouvant ainsi être intégrés aux offres futures.
Efforcez-vous d’aller vers des business models « as-a-service »
« Tout est service » va devenir le paradigme de la future Économie du résultat. À partir du moment où les clients n’auront plus besoin de détenir la pleine propriété de combinaisons de produits et services, ils se contentent de les utiliser discrétionnairement – « as a service » –, selon leurs besoins. En effet, les appareils intelligents et plus connectés produiront de grandes quantités de données ; elles serviront de base à tout une palette de nouveaux business models, fondés sur les données et le service. C’est une conséquence de la 2ème clé de réussite. Les produits connectés peuvent favoriser la création de services fondés sur les données, à condition cependant qu’une infrastructure digitale de support soit développée et capable d’être reconfigurée de différents manières pour engendrer de nouvelles chaînes de valeur et réseaux. Par exemple, grâce à la connectivité et aux appareils intelligents, Michelin a pu faire évoluer une partie de son activité, de la vente de pneus vers une garantie « as-a-service » de mobilité et de sécurité.
Créez des écosystèmes et gérez-les
Aucune entreprise ne sera capable à elle seule de détenir toute la chaîne de valeur digitale, à un stade avancé de l’Économie du résultat. Dans l’univers mondialisé et évolué de l’IIoT, des entreprises « sans frontières » orchestreront et géreront leurs écosystèmes multidimensionnels. Fournisseurs, clients, partenaires technologiques, start-ups, universités, concurrents, sous-traitants, franchisés et distributeurs en feront partie. Tous seront des éléments d’une entité économique symbiotique et poreuse, installée au cœur d’un écosystème économique. Les dirigeants d’entreprise devront privilégier la concentration pour avoir une vue d’ensemble, créer et composer l’écosystème. Associer leur connaissance du produit et du client avec l’expertise des processus et des technologies de partenaires externe sera la norme plutôt que l’exception.
À la concurrence entre des entreprises se substituera une concurrence entre des écosystèmes digitaux dynamiques et leurs principaux acteurs. Heureusement, les entreprises n’auront plus besoin de détenir en interne toutes leurs capacités digitales, ni même la plupart. Mais la dynamique d’assemblage de ces capacités sera un atout concurrentiel capital. Être capable d’analyser, d’envisager différentes options et d’instaurer des schémas de participation au sein des écosystèmes sont autant des capacités nouvelles et essentielles dont les entreprises ne pourront se passer. Ce nouvel état d’esprit est à des années-lumière de l’exercice des traditionnelles relations fournisseurs qui, même si elles ont pu bien fonctionner autrefois, n’auront plus leur place dans ce nouveau monde.